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« Crises de Succession et Cohésion Sociale : L’Évolution des Chefferies Traditionnelles au Gulmu » l’analyse du Dr IDANI Salifou

Ceci est une analyse approfondie des crises de succession au sein des chefferies traditionnelles du Gulmu, une région du Burkina Faso faite par le docteur IDANI Salifou. Il fait une étude scientifique de la chefferie dans le gulmu depuis le début des années 2000, marquée par des conflits violents, entraînant des conséquences dévastatrices sur la cohésion sociale et la sécurité régionale. En 2020, la situation a atteint un paroxysme avec l’intronisation de deux rois à NUNGU, exacerbant la problématique des doubles chefferies. Cette analyse met en lumière les causes historiques et contemporaines de ces crises, notamment les luttes fratricides datant de 1892 et les interférences politiques qui ont suivi la colonisation. Elle souligne également l’impact de ces conflits sur le développement économique et social de la région, ainsi que la nécessité d’une meilleure compréhension des us et coutumes traditionnels.

Depuis le début des années 2000, les chefferies politiques traditionnelles du Gulmu connaissent des querelles de succession souvent marquées par des violences entrainant des morts d’hommes. Ainsi, on trouve dans les Diéma (provinces) ou ex-cantons créés par les colonisateurs, dans les villages deux (02) voire trois (03) chefs. Cet état de fait entame la cohésion sociale dans la Région de l’Est. Le paroxysme a été atteint en 2020 lorsque la crise pour l’accession au trône de NUNGU (Fada N’Gourma) a vu l’intronisation de deux (02) NUNBETIEBA (sing. NUNBADO) ou rois.

On assiste depuis lors à une course aux nominations par les rois dans les Diema et même dans les villages, aggravant ainsi la situation conflictuelle des doubles chefferies. Ces crises sont en partie dues aux séquelles des luttes fratricides éclatées en 1892 pour l’accession au trône de NUNGU.
Cette situation gravissime rend très difficile la lutte contre le terrorisme dans la Région de l’Est et embarrassante pour l’autorité car l’Administration dit rester à l’écart des chefferies traditionnelles et coutumières dont elle ne maîtrise pas les tenants et les aboutissants.

Quelles sont les causes de ces crises à répétions dans cet ancien royaume de l’Afrique de l’Ouest qui avait pourtant une organisation politique et administrative qui assurait convenablement la gestion de la communauté ? pour répondre à cette question, nous estimons que les historiens, les dépositaires des us et coutumes sont interpellés.

Pour notre part, nous apportons notre modeste contribution à la connaissance de l’histoire de cette société gulmance en matière de gouvernance. Nous avons surtout utilisé les documents écrits notamment les différents rapports, les archives laissés par les conquérants et colonisateurs européens, les missionnaires religieux enfin les travaux scientifiques des chercheurs. Ces documents sont complétés par les récits des détenteurs des traditions orales. Une constance se dégage : une méconnaissance de l’histoire récente et les us et coutumes de la région par une grande partie des acteurs dans ce domaine complexe.

Notre apport s’articulera autour des points suivants : 1 généralités sur les crises et organisation administrative traditionnelle, 2 Les causes des crises dans les chefferies en pays gulmance, 3 les conséquences relatives aux crises dans les chefferies au Gulmu 4 les propositions et suggestions de solutions.
I généralités sur les crises et organisation administrative traditionnelle.

1°) généralités sur les crises

Le Gulmu ou Région de l’Est constitue un véritable problème de nos jours. Il est un problème aussi bien pour les populations de cette partie du Burkina Faso que pour tout le pays dans son ensemble pourtant fragilisé déjà par de multiples crises internes et externes.
Le phénomène de doubles chefferies qui entrave tout effort de développement, s’explique par la méconnaissance de l’histoire de cette région. En effet, avant que les Français n’apparaissent dans cette région comme des colonisateurs, leurs explorateurs avaient déjà fini le travail sur l’études de l’organisation et le comportement de ses hommes.
La conférence de Berlin tenue du 15 novembre 1884 au 26 février 1885 a eu lieu grâce aux différents rapports des explorateurs sur le continent africain.

Cette conférence avait défini les clauses d’occupation dont certaines seront plus tard à l’origine des crises dans la plupart des chefferies traditionnelles dans les pays qui n’ont pas mis des gardes fous dans la gestion des entités politiques traditionnelles comme c’est le cas au Burkina Faso. Une de ces clauses stipule que lorsqu’une puissance européenne signe un traité avec un chef traditionnel et qu’une autre puissance signe un traité avec un autre chef traditionnel qui est subalterne du premier, ce dernier traité est nul et nul d’effet. En pays gulmance, cette clause a entraîné des batailles diplomatiques entre Français et Allemands qui avaient successivement signé en 1895 des traités de protectorat avec le roi Bantchandé de Nungu et le chef de Matiacoali Torintodiba pour l’occupation du même espace territorial car les Allemands soutenaient que ce dernier était le supérieur de Bantchandé.

Et pourtant, les archives, les rapports laissés par les métropoles sont riches en enseignements sur l’organisation des sociétés africaines précoloniales dont l’Etat pourrait s’en inspirer et servir de base l’écriture d’une charte des chefferies traditionnelles et coutumières.

Pour le Gulmu, les documents abondent dans les centres de documentation au Benin, au Burkina Faso, au Niger, au Sénégal, au Togo, en France et en Allemagne. En exploitant ces documents, l’Etat central pourrait bâtir une charte de gestion dans ces entités territoriales traditionnelles, ce qui va contribuer à éviter les crises récurrentes que nous connaissons dans cet ancien royaume jadis bien organisé, bien respecté par l’administration.

En ce qui concerne toujours le Gulmu, il y a lieu de préciser que ce sont les notables notamment les griots (Bantiadi) spécialistes de l’histoire de Nungu ou ceux proches du Nunbado Bantchandé qui ont donné les informations aux Français qui les ont consignées dans les différents rapports transmis à la métropole. Il faut noter que les griots tout comme les notables, étaient pétris de connaissance et transmettaient les évènements historiques de génération en génération le plus fidèlement possible. En effet, la moindre erreur et le mensonge dans le récit généalogique d’une dynastie entrainait inéluctablement la mort.

Or de nos jours, nous remarquons qu’il y a un regain d’intérêt pour l’histoire de nos sociétés à tel enseigne que tout le monde devient « historien » quand des difficultés surviennent et bonjour les dégâts. Toutes ces dérives sont dues en grande partie à la non maîtrise voire la méconnaissance même de l’histoire. En prenant connaissance des données des archives, des travaux des chercheurs, on peut découvrir une vérité historique jusque-là ignorée. Cela va éviter certains comportements inappropriés de femmes et d’hommes qui sont de nature à mettre en péril la paix, la cohésion sociale et le vivre ensemble tant recherchés. Puisque les colonisateurs dans leur volonté de dominer et d’exploiter les peuples conquis, ont mis en place un système politique qui leur permet de rester maître dans les pays colonisés notamment en Afrique noire : la politique du « diviser pour mieux régner ».

Au Gulmu, cette politique a trouvé un « terreau » fertile d’encrage à savoir le babidjali, une tare culturelle néfaste qui consiste à nuire gratuitement et inutilement son prochain surtout de même sang pour étouffer une émergence sociale. Nous disons d’or et déjà que cette tare culturelle doit être abandonnée au plus vite par les générations actuelles si nous voulons léguer un Gulmu prospère dans un Burkina uni et développé. Un changement de mentalité s’impose. A défaut d’être une solution pour sa sœur ou son frère, le gulmance doit surpasser son égo et aimer son prochain comme lui-même. Ainsi, les filles et fils du Gulmu, dans une synergie d’action contribueront à l’amorce de son développement économique et social.

2°) Organisation administrative traditionnelle

Avant la conquête coloniale, les explorateurs européens ont parcouru les territoires africains convoités en étudiant le mode d’organisation et de fonctionnement des différentes sociétés afin de faciliter la tâche des conquérants militaires qui seront envoyés plus tard pour la conquête et l’occupation effective de terres.
En pays gulmance, dans le rapport de conquête daté du 29 mai 1897, le Capitaine d’Infanterie de Marine VERMEERSCH écrit : « ce royaume est divisé en provinces chacune administrée par un fama ou bato (bado, chef), élu par les notables dont la nomination doit être validée par le roi. Ces provinces sont : au centre, les provinces de Matiacoali, de yamba, de Toucouna (Diapangou) et du Gourma proprement dit où se trouve la capitale du royaume, Fada N’gourma. Cette province est directement administrée par le roi ».

Quant à CHANTOUX (1964, P 45), Préfet Apostolique de Fada N’gourma, il cite les provinces (Diema) qui formaient le Gulmu à l’arrivée des Français. Ce sont : Noungou (Fada N’Gourma), Diapangou, Piéla, Bilanga, Bogandé, Thion, Koala, Yamba, Matiacoali, Bizougou (Partiaga), Gobnangou, Konkobiri (actuellement au Bénin), Madjoari, Pama, Diabo, Lamigou (Komin-Yanga), Youtenga (Yondé), Nabangou (Soudougui).

MADIEGA Y. Georges (1982, p 76), le premier à mener des études scientifiques sur le pays gulmance soutient qu’il n’y a pas un royaume gulmance mais une confédération de royaumes : « il n’y avait donc pas un royaume du Gulma, mais des royaumes gulmanceba. Les diema indépendants étaient des « royaumes » au plein sens du terme. Les diema « vassaux » s’étaient constitués en fait, en royaumes indépendants sous le lointain contrôle du NUNBADO. L’ensemble des royaumes formaient une sorte de confédération dans laquelle le NUNBADO était le primus inter pares. Il n’existait pas de pouvoir centralisé à l’échelle de l’ensemble du Gulma ».

Les informations sur l’organisation du pays gulmance ont probablement été fournies aux colonisateurs par les détenteurs des traditions historiques (la tranche d’âge variait entre 60 et 80 ans au moment des enquêtes) appartenant à la cour royale de NUNGU (Fada N’Gourma) dont le roi BANTCHANDE était un allié fidèle des Français avec lesquels il a signé un traité de protectorat le 20 janvier 1895 à Diabo. En effet, tous ses ennemis redoutables comme le JAKPANBADO (chef de Diapangou) YUABILI, TORINTODIBA le chef de Matiacoali et leurs alliés qui n’ont pas accepté se soumettre aux diktats des Français n’ont certainement pas fourni d’informations aux nouveaux maîtres du Gulmu. Quelles sont les causes des multiples crises.

II Les causes des crises dans les chefferies en pays gulmance

Les causes lointaines et les causes immédiates justifient les crises dans les chefferies actuelles.

A°) les causes lointaines

  La crise de 1892 ou la lutte entre BANTCHANDE et YENTUGULI
A la veille de la conquête coloniale du Gulmu, des querelles fratricides éclatent entre les deux frères consanguins dans le Diema de NUNGU dont les conséquences sont perceptibles encore de nos jours.
En effet, à la mort de Yenkoari (23e Nunbado : 1883-1892), BANTCHANDE avec la bénédiction du Téïdano fut désigné comme successeur en ignorant totalement le fils ainé YENTUGULI. Le Téïdano était le chef des guerriers du NUNBADO et avait une voix prépondérante au sein du collège électoral car une de ses missions était la protection du futur roi une fois introduit dans la case d’initiation à l’exercice du pouvoir qui durait une semaine.

La mémoire collective au Gulmu retient également que le Teïdano avait eu auparavant des démêlées avec YENTUGULI pour une affaire de femme. Pour laver cet affront, YENTUGULI et ses partisans dont des membres du collège électoral firent appel à YUABILI, chef de Diapangou qui disposaient d’intrépides guerriers de renom. YUABILI qui connaissait bien les règles en matière de désignation de roi à NUNGU (la dynastie régnante à Diapangou vient d’une princesse de NUNGU appelée O BARNATANU), marqua son accord pour l’accompagnement du fils ainé estimant qu’il y a eu entorse dans la procédure de désignation de BANTCHANDE selon les traditions recueillies à Diapangou. Cependant, il donna des consignes claires à ses guerriers à savoir assurer la protection de YENTUGULI qui doit être intronisé et accomplir les rites de légitimation sur les terres de NUNGU notamment à Koaré.

Au septième jour, à la fin des rites, ces mêmes guerriers devaient procéder à l’installation de YENTUGULI sur le trône de ses aïeux déjà occupé par le petit frère. C’est ce qui fut fait en 1892 après avoir délogé BANTCHANDE. Les combattants de Diapangou ont gardé la cour royale de NUNGU pendant une dizaine de jours avant de se retirer à la demande de YENTUGULI. Le nouveau roi était rassuré que ses fidèles notamment ses guerriers prendront la relève pour sa sécurité.
Contre toute attente, après le départ des troupes de Diapangou, BANTCHANDE réapparait accompagné des guerriers de Matiacoali (son village maternel) parmi lesquels figurait le célèbre guerrier Galja. Ils surprennent YENTUGULI qui est assassiné et mutilé.

A l’annonce de cette tragique fin de YENTUGULI, il y a eu une descente punitive des guerriers de Diapangou cette fois appuyés de leurs alliés de Bilanga. Leur intervention à NUNGU a contraint BANTCHANDE à abandonner une fois de plus sa capitale pour se réfugier à Diabo, un Diema qui lui est resté fidèle et qui se trouve être le village maternel du chef de Diapangou ce qui est significatif dans la société gulmance car aucun neveu ne doit poser des actes négatifs dans sa famille maternelle. C’est dans cette localité que BANTCHANDE va signer le 20 janvier 1895 le traité de protectorat avec le Commandant DECOEURS et solliciter l’appui de ce dernier pour anéantir ses ennemis et principalement Diapangou. Le reste de l’histoire de la conquête à la pacification du Gulmu est matérialisé par de nombreux écrits.

L’engouement de BANTCHANDE a signé le traité avec DECOEURS n’est pas fortuit car il avait eu connaissance de la puissance des soldats européens par l’intermédiaire de sa tante qui a vécu en Gold Coast. A ce sujet, le Capitaine VERMEERSCH dans son rapport du 29 mai 1897 à Madjoari note que : « il (BANTCHANDE)avait auprès de lui une tante, vieille femme qui avait longtemps habité la côte. Son mari avait été au service du Gouvernement de Gold Coast et ses deux fils servent encore les Anglais ». En effet, cette femme a appris en Gold Coast comment les Anglais ont vaincu des royaumes puissants comme celui des Ashanti avec de puissantes armes à feu.

L’appel au secours de BANTCHANDE sera exaucé en 1897 avec l’occupation effective des terres conquises par les Français et le Diema de Diapangou principale force guerrière du moment va en premier subir la rage de vaincre des conquérants européens et payer le plus lourd tribut. En effet, l’attaque du Jakpantugu (énorme haie vive de protection où se retranchaient les populations et les guerriers en cas d’attaques ennemis) le 05 février 1897 a été un véritable désastre étant donné que c’était en pleine saison sèche. A ce sujet, plusieurs écrits en font cas.

MADIEGA Y. Georges (1982, p. 98) note à ce sujet que : « Tukuna (Jakpangu/Diapangou), principal foyer de la résistance, fut attaqué. Le village réputé imprenable, était entouré par une épaisse haie d’épineux de 100 à 200 mètres de large. Après trois heures de combat acharné, Tukuna est enlevé et brûlé. Il y eut plusieurs morts comme le reconnaît Baud lui-même. Enfin vers 10 heures, pas mal de morts jonchaient les buissons, les flèches étaient moins drues… ». Il ajoute que Baud, dans aucun de ses rapports au Gouverneur du Dahomey ne mentionne le nombre de morts sans doute pour cacher les atrocités commises. Presque tous les combattants et la population retranchés à l’intérieur du buisson furent décimés par les flammes.

Jeanne-Marie KAMBOU-Ferrant (1993, p 148) nous apprend que : « Certes, depuis le passage du Commandant Decoeur, Bantchandé avait sollicité et obtenu l’alliance et l’aide militaire des chefs mossi de Koupéla et de Boulsa. Mais cet ultime assaut d’énergie se termina par un immense désastre militaire, et acheva de ruiner toute crédibilité en son pouvoir. Les Mossi perdirent tant des leurs, que le Boulsa Naba attenta à ses jours, suivant en cela le code d’honneur des guerriers mossi. Les armées mossi démantelées se retirèrent. Bantchandé commandant des forces inférieures en nombre et en valeur aux contingents de ses adversaires ne put résister aux assauts de ces derniers. Chassé de Fada, il trouva refuge derrière les murs de Diabo ».

Jeanne-Marie KAMBOU-Ferrant poursuit à la page 150 : « Ce répit fut mis à profit pour envoyer le lieutenant Vermeersch au-devant de la colonne Voulet. Le 16 février les deux colonnes étaient réunies à Tibga. La rencontre des deux missions avait en effet été décidée par leurs chefs, principalement dans un but politique : montrer aux Gourmantché et aux Mossi la puissance de la France, cette nation capable de jeter à bas de son trône un roi (Moogo Naaba WOBGO) qui n’avait pas voulu recevoir ses envoyés, ou les avait maltraités, et de rétablir sur le sien un autre roi (BANTCHANDE) qui s’était donné à elle ».

Les informations de ces deux chercheurs montrent à quel point le NUNGU était affaibli à l’arrivée des colonisateurs français qui voulaient coûte que coûte faire la jonction entre leur colonie du Dahomey et celle du Soudan Français. Il leur faillait par tous les moyens anéantir Diapangou qui était un véritable obstacle à leur projet. Ce qui fut fait le 05 février 1897 avec la destruction du JAKPANTUGU suivie du suicide de son chef YUABILI qui a préféré la mort à l’humiliation. Le Gulmu dans son ensemble venait ainsi d’être placé sous le protectorat de la France en vertu de son traité signé le 20 janvier 1895 à Diabo avec le roi BANTCHANDE.

Ainsi pour la consolidation de leur assise au Gulma, CHANTOUX, Alphonse (1964, p 49) note que « après la conquête, le Capitaine BAUD aide donc le roi BANTCHANDE a imposé son autorité. C’est l’occasion de quelques opérations punitives ». Les Français ont assassiné ou chassé tous les chefs opposés à BANTCHANDE dont certains comme ceux de Matiacoali et de Pama ont rejoint les Allemands à Sansané Mango (Togoland). Les moins chanceux ont été purement et simplement exécutés. Tous ces chefs hostiles à BANTCHANDE ont été remplacés par des hommes qui lui sont fidèles sous le regard du colonisateur qui n’en demandait pas mieux. C’est cette partie de l’histoire qui a laissé croire que le NUNBADO nommait directement les chefs de Diema.

Au regard de la documentation disponible sur la période coloniale, il est indiscutable que le Jakpanbado YUABILI était le maître du jeu politique du Gulmu à la veille de l’arrivée des colonisateurs européens par ses hauts faits de guerre. De nos jours, Diapangou ne ressemble pas à un Diema qui a connu un passé glorieux n’eut été la révélation des archives et des ouvrages historiques. Et pourtant, cette entité politique traditionnelle a payé le plus lourd tribut de cette rencontre avec l’occident dont la principale conséquence est le dépeuplement avec le massacre du 05 février 1897. A la suite des causes lointaines, que pouvons-nous retenir des causes immédiates ?

B°) les causes immédiates

  Les interférences politiques et les moyens financiers
Depuis l’instauration du pouvoir colonial par les Français, la politique s’est invitée dans le pouvoir traditionnel et coutumier et cela a entrainé une vague de destitution de chefs selon les intérêts du colonisateur. Les premières victimes sont ces chefs qui ont favorisé leur installation en pays gulamance notamment le roi BANTCHANDE en 1911 parce que ce dernier ne faisait plus leur « affaire ». Il est remplacé par Simadary fils son rival dans la conquête du trône de NUNGU en 1892. Ce dernier sera à son tour destitué en 1952 à cause de son opposition à la politique des autorités Françaises de l’époque. Son successeur est HAMTIOURI fils de BANTCHANDE.

Dans tous les cas, il est reconnu depuis le Général De Gaule que « la France n’a pas d’amis mais des intérêts ». Comme vous pouvez le constater, c’est la politique du « diviser pour mieux régner » qui était en marche jusqu’à l’accession de la Haute-Volta à l’indépendance où la première République a pris un décret datant du 08 juin 1962 interdisant le remplacement de chef décédé. C’est sous le régime du Président Sangoulé LAMIZANA que la mesure d’interdiction a été levée permettant la reprise d’intronisation en remplacement des chefs décédés notamment à NUNGU et revoilà la politique sur l’arène des coutumes et des traditions. De 1972 à 2002, les acteurs politiques ont su plus au moins éviter l’éclatement du système traditionnel de gouvernance.

La principale cause immédiate vient des appétits politiques du roi KOUPIENDIELI (2002-2019), fils de HAMTIOURI. Il a entraîné les chefferies traditionnelles dans l’abîme en surestimant son pouvoir de nomination (il confond avec une administration républicaine), procédant lui-même et directement au choix des chefs de Diema et même aux chefs de villages au mépris des règles prescrites en la matière qui constituent en réalité « des constitutions orales ». Des membres des collèges électoraux locaux et des notables ont attiré vainement l’attention de KUPIENDIELI sur ces faits et ce qui devait « arriver arriva ». Ce qui a entraîné une vague de contestations parfois violentes dans certaines localités.

C’est alors que les notables des différentes localités concernées, constatant de graves irrégularités dans les choix du NUNBADO, les considérant comme des choix purement politiques en ont tiré les conséquences. Ainsi, les collèges électoraux compétents dans la désignation des chefs ont procédé à l’intronisation des candidats répondants aux règles prescrites par les et us et les coutumes d’où la naissance des doubles chefferies et l’installation d’un désordre jamais égalé dans le royaume allant des Diem aux villages, voire même dans les familles.

A Fada N’Gourma, le Professeur MADIEGA a fait un travail formidable sur le mode de désignation des rois de NUNGU en interrogeant des personnes de ressources respectables comme TANKOANO Janja Frédéric ou sa Majesté YENTANGU. Si en 2020, on remet en cause le travail de cet imminent Professeur qui s’est donné corps et âme pour la recherche historique du Gulmu dont les principaux informateurs étaient de la cour du NUNBADO, c’est que le problème du gulmance c’est le gulmance. En tout état de cause, il est mondialement reconnu que « nul n’est prophète chez soi » mais un travail scientifique reste un travail scientifique. Il faut trouver d’autres éléments scientifiquement prouvés pour améliorer un travail déjà réalisé et approuvé.

Le constat de nos jours est que la chefferie coutumière est devenue un tremplin d’ascension politique pour des hommes et des femmes dans ce pays. Et la politique elle-même est devenue un fonds de commerce que les uns et les autres investissent et pour par la suite récolter les dividendes, d’où l’intervention des bailleurs de fonds ou des hommes d’affaires dans la conquête des trônes.

Le rappel historique est très importants pour les jeunes et les générations futures. En effet, beaucoup d’acteurs du domaine coutumier et traditionnel ignorent l’histoire, les us et coutumes et surtout du passé récent consignés dans de nombreux documents. Et pourtant, la connaissance de ce passé va permettre aux uns et autres d’adopter un comportement modéré dans les faits et gestes au quotidien. En adoptant, une position d’humilité et de courtoisie, l’homme gulmance deviendra une solution pour son frère et sa sœur, ce qui va sans doute contribuer avec les autres communautés du Burkina Faso à la construction d’une nation unie, prospère et émergent. Pour le moment, les conséquences de ces crises sont incalculables sur le plan économique pour une région très riche.

La lecture croisée des informations écrites et celles des traditions orales permettront de bâtir un code adapté à la gestion aux présentes crises de chefferies au Gulmu.
Au nombre des multiples difficultés que connaissent les chefferies dans le Gulmu nous avons le surdimensionnement du pouvoir du NUNBADO par le colonisateur.

C°) Le renforcement du pouvoir du NUNBADO les colonisateurs français après leur victoire sur Diapangou le 05 février 1897

Le titre de roi du Gulmu a été donné par les colonisateurs français tout comme celui d’Empereur des Moose attribué au Moogo Naaba du royaume de Ouagadougou avec pour objectif principal de contrer les visées de leurs principaux concurrents que sont les Allemands et les Anglais qui convoitaient le même espace territorial.
Nous revenons dans cette partie en détail sur la clause de notification relever plus haut par la conférence de Berlin tenue du 15 novembre 1884 au 26 févier 1885.

Au Gulmu, les Français étaient en compétition avec les Allemands qui avaient signé des traités avec les chefs BAHAMA de Pama le 20 janvier 1895 dans la matinée tandis que les Français signaient le même jour et avec le même chef dans la soirée. Après Pama, la mission allemande se dirigea sur Matiacoali où elle signa un traité avec TORINTODIBA supposé être le supérieur du chef de Pama.

Quant aux Français, mieux renseignés ils prirent la direction de NUNGU. A leur arrivée dans cette ville, ils apprirent que le NUNBADO BANTCHANDE (ROI) est depuis trois (03) ans à Diabo. Ils le rejoignirent dans cette localité et signèrent avec lui le 20 janvier 1895 un traité de protectorat. BANTCHANDE informé de la puissance de feu des Européens leur demanda de l’aider à détruire tous ses ennemis surtout YUABILI, le chef de Diapangou et leader de la révolte. Cette sollicitation a été exaucé le 05 février 1897 avec l’attaque du Jakpantugu. Donc, avant l’arrivée des Français, le JAKPANBADO (chef de Diapangou) avait les cartes politiques du Gulmu en main.

Au vue des informations recueillies au niveau des différentes sources, il est ressorti que le NUNBADO n’a pas pouvoir de nomination des chefs des Diema (ex- cantons). Ses prérogatives d’exercice direct de commandement se limitent à NUNGU. Lesdites limites correspondent de nos jours à celles du département et de la commune de Fada N’Gourma.
Du reste le portique de la cour royale de KUPIENDIELI à Fada N’Gourma indique bien « NUNBADO DIEGU » et non « GULMU BADO DIEGU » ce qui n’existe pas en langue gulmancema.

Les données obtenues des différents rapports et travaux scientifiques, montrent que le NUNGU est un Diema au même titre que les autres entités politiques historiques du Gulmu. Cependant, le NUNGU est reconnu comme l’aîné, c’est-à-dire le plus ancien Etat fondé en pays gulmance par DIABA LOMPO. A ce titre, NUNBADO (chef, roi) de NUNGU a une ascendance honorifique sur les autres chefs du Gulmu. Ces derniers lui doivent respect et considération une fois investis des charges de leur Diema.

En revisitant l’histoire récente de la chefferie de certains Diema comme Diapangou et Diabo, on constate que les rois de NUNGU (YENTANGOU et HAMTIOURI) de l’époque ont procédé autrement pour le choix des chefs des deux Diema lors des crises survenues dans ces entités politiques. Ces deux rois ont compris et savent que le NUNBADO ne choisit pas de lui-même les futurs chefs mais entérine les choix faits au niveau des collèges électoraux des Diema.

A titre illustratif, nous avons les deux exemples récents. Le premier concerne Diapangou. Suite à des querelles dans la désignation d’un nouveau chef à Diapangou, le poste est resté vacant pendant neuf (09) ans soit de 1980 à 1989 suite à la disparition de TODIBEMBA (1952-1980). Les notables ont saisi le roi YENTANGOU grand frère de KOUPIENDIELI (NUNBADO décédé en 2019) pour décanter la situation. Ne pouvant pas choisir lui-même le futur chef de Diapangou, YENTANGOU a proposé un vote populaire en 1989 supervisé par son ministre DABAGO qui a vu la victoire de YENDIELI resté au trône de 1989 à 2004.

Le second exemple concerne la chefferie du diéma de Diabo. En 1961, suite à la mort du chef de ce Diema, une grave crise éclata. Devant l’impossibilité de trouver un terrain d’entente, le roi HAMTIOURI, (père des rois YENTANGOU et KOUPIENDIELI) ne pouvant pas désigner de lui-même le futur chef de Diabo a lui aussi organisé un scrutin qui a vu la victoire de Monsieur YONI Noaga Fernand. El Hadji BOLY Berry en explique largement dans une lettre au Haut-Commissaire du Gourma du 20 janvier 2003.

Outre ces deux cas récents où le NUNBADO a fait appel aux scrutins pour départager les candidats, on peut citer aussi celui de Matiacoali en 1897 où pour remplacer le chef en fuite face à la poussée des Français, BANTCHANDE n’a pas choisi lui-même le successeur de TORINTODIBA. BANTCHANDE a fait venir les notables qui choisirent le chef comme le dit VERMEERSCH dans son rapport sur la conquête du Gourma : « Il (BANTCHANDE) envoie aussitôt chercher les notables de Matiacouali. Ceux-ci arrivent dans la nuit. Le lendemain matin, dans un grand palabre, les notables élisent un nouveau chef et le soir à 2 heures de l’après-midi, Bantchandé lui donne un bonnet blanc ce qui le consacre comme fama (chef) ».

Le dernier exemple dans la résolution des crises dans les chefferies en pays gulmance vient de Fada N’Gourma. A NUNGU (Fada N’Gourma) même, la disparition du roi HAMTIOURI le 26 novembre 1961 et Simadoali le 17 mai 1962, il y a eu un grand vide dans l’intronisation d’un NUNBADO. En effet, sous la première République, le décret n° 189/PRES/INT du 08 juin 1962, portant interdiction de remplacer tout chef coutumier décédé était en vigueur. Toutefois, avec l’arrivée au pouvoir du Président Sangoulé LAMIZANA cette mesure a été levée. Pour pourvoir au remplacement du roi HAMTIOURI, il n’y avait pas d’entente entre les princes de Fada N’Gourma. Il a fallu organiser des votes en 1972 qui ont permis à YENMIAMA d’accéder au trône de NUNGU.
Ces quelques exemples montrent que les rois du NUNGU étaient attachés aux respects des règles coutumières en matière de désignation des chefs des Diema.

III les conséquences relatives aux crises dans les chefferies au Gulmu

Le Gulmu vit ses heures les plus sombres de son histoire. Jadis très respectées, les chefferies du pays gulmance sont de nos jours mal en point à cause de ces luttes fratricides qui perdurent depuis en 1892.
La conséquence générale est la division quasi totale des populations à tous les niveaux de la vie. Ce manque d’unité même pour défendre ce qui revenait de droit naturel à la Région de l’Est a entrainé cette vaste et riche région dans l’abîme total. Le Gulmu vit de nos jours les jours les plus sombres de son histoire depuis la fondation du royaume par le célèbre DIABA LOMPO. Il est temps de changer le fusil d’épaule afin de faire renaitre l’espoir surtout pour les générations à venir. Un changement de mentalité s’impose.

Au niveau des villages, les responsables administratifs, les chefs des projets et programmes ne savent pas à qui se confier pour espérer réussir les missions qui leur sont confiées. Or, dans les villages la caution morale des détenteurs des traditions est très capitale. C’est pourquoi, de nombreux projets n’ont pas connu d’aboutissement heureux.

Il en est de même dans les centres urbains notamment les chefs-lieux de province où les responsables nouvellement affectés peinent à présenter les civilités aux autorités coutumières ou se contentent à se présenter dans les différentes cours royales juste pour les formalités. Par la suite, ils restent cloitrer dans leurs services et ne donnent pas suite aux invitations de l’un ou de l’autre des chefs.

En outre, dans un pays comme le Burkina Faso en proie à l’insécurité, dans la recherche de solutions aux différentes crises, des rencontres des forces vives sont très souvent organisées au plus haut niveau. Malheureusement, à cause des doubles chefferies, le Gulmu n’est pas présent à ces concertations de grande importance.

Dans le cadre de la lutte contre le terrorisme et le grand banditisme dans la région de l’Est, le phénomène de doubles chefferies entrave les actions à mener sur le terrain. Dans le recrutement des Volontaires pour la Défense de la Patrie (VDP), il devient difficile de confier des armes à des individus qui peuvent s’entretuer. Il faut le faire après de longues enquêtes de moralité. Autrement dit de par le passé, en cas de menaces extérieures, il suffisait que le chef convoque en urgence un conseil de guerre et une mobilisation générale pour que le danger soit rapidement maîtrisé.

De nos jours, la région de l’Est est considérée comme une zone infréquentable dont les conséquences économiques sont incalculables. Toutes les activités économiques sont en berne (agriculture, élevage, commerce, tourisme). Beaucoup de partenaires techniques et financiers hésitent voire refusent d’intervenir dans cette région aux énormes potentialités économiques. Ceux qui étaient présents, délocalisent ou quittent totalement la région entraînant du coup un grand retard dans le développement de la région.

Le manque d’unité, de cohésion des fils et filles du Gulmu ajouter au phénomène néfaste du babidjali entretenu par certaines personnes ont également contribué à la non érection de Diapaga et Bogandé en chef de région, mesure qui aurait pu relancer le Gulmu dans la dynamique de développement avec un maillage administratif et sécuritaire adéquat.

Le cas inédit de double chefferie qui s’est produit à NUNGU Fada N’Gourma conséquence des nominations illégales et irrégulières dans les Diema et villages peut si on n’y prend garde créer une jurisprudence dans les autres grands royaumes du Burkina Faso. Il en serait de même dans les Diema gulmance des pays voisins cités plus haut.

Si les crises s’accentuent dans toutes les communautés, mettent à mal la cohésion sociale, vivre ensemble et menacent les fondements de la nation, il ne serait pas exclu que des mesures d’interdiction de remplacement de chefs décédés au niveau national soient prises comme ce fut le cas en 1962.
C’est pourquoi, il y a lieu de trouver des solutions idoines et urgentes à ces problèmes récurrents qui entravent le processus de développement du pays.

IV les propositions et suggestions de solutions

Le Professeur MADIEGA Georges a fait un énorme travail sur le pays gulmance. L’organisation, le fonctionnement en un mot la gouvernance ont été étudiés. Les modes de succession bien déclinés par les détenteurs des traditions notamment des notables dont la notoriété était incontestable dans la communauté comme TANKOANO Janja Frédéric et du roi YENTANGU.

Du reste, la situation politique à la veille de conquête coloniale montre à souhait que les Diéma étaient déjà indépendants les uns des autres en reconnaissant toutefois le droit d’aînesse de NUNGU. Le NUNBADO se contentait de valider le choix fait par les collèges électoraux des Diema. Il est à noter que le choix du candidat qui sera présenté au NUNBADO se fait après de enquêtes et de nombreuses consultations auprès des géomanciens et autres devins de renommée. Pour un retour à la cohésion sociale dans le Gulmu du Burkina Faso, il faut :

 Respecter l’autonomie des Diema dans la désignation des futurs chefs par les collèges électoraux locaux ;

 Garder en l’état les situations malheureuses de doubles chefferies créées dans les ex-cantons et villages depuis deux décennies par des hommes politiques tant que l’ordre public n’est pas mis à rude épreuve ; toutefois, il faut prendre des mesures pour que cela n’arrive plus dans les Diema et les villages concernés même si localités vont rester sans chef tant qu’un consensus n’est pas obtenu ;

 Recadrer les pouvoirs du NUNBADO au regard du contenu des archives et travaux scientifiques réalisés car c’est surtout la volonté de ce dernier à imposer des chefs dans les autres Diema et villages qui sont à l’origine de la plupart des crises en pays gulmance ces dernières années ;

 Que toute personne qui accède à la chefferie de Diema notamment le NUNBADO se retire de la scène politique ; FIIMBA, le chef de PAMA, l’a fait lorsqu’il a été intronisé pour conduire les destinées de KANKANGOU en 1995.

 Que tous les ministres, notables ou princes de NUNGU sachent que le NUNBADO n’est pas habilité à désigner lui-même un chef dans les autres Diema encore moins dans un village qui ne relève pas de son commandement direct et par conséquent cessent toute ingérence dans lesdits Diema ou villages ;

 Que tous les ministres, notables ou princes des autres Diema ou villages de leur ressort territorial sachent que le choix des chefs ou « quête de bonnet » ne se fait pas à NUNGU. C’est le collège électoral local qui, après des concertations et diverses consultations désigne le candidat retenu. C’est celui-là seul et seulement lui seul que les notables accompagnent et présentent au NUNBADO pour validation et bénédictions ; Les pouvoirs du NUNBADO sont honorifiques. Il est le symbole et le ciment de la société gulmance reconnus et admis par toutes les filles et fils du Gulmu.

 La convocation d’une assise régionale sous la supervision de l’Etat central pour résoudre une fois pour toute ce phénomène de doubles chefferies qui met à rude épreuve la paix, la cohésion sociale, le vivre ensemble tant recherchés au Burkina Faso. Du reste, les assises pour l’adoption du Mémorandum pour le Développement de la Région de l’Est tenues le 26 novembre 2022 avaient fait cette recommandation.

 Elaborer un statut de la chefferie coutumière selon les systèmes de gouvernance traditionnel en place à l’arrivée des colonisateurs. Des pays voisins comme le Ghana en possèdent.
En histoire il y a une dynamique constante : les dynasties et les lignées naissent, grandissent, atteignent leur apogée puis s’éteignent en laissant la place à d’autres qui prennent la relève. Le Gulmu ne saurait déroger à la règle.

De nos jours les pouvoirs des chefs traditionnels et coutumiers sont surtout honorifiques et symboliques car n’étant plus des auxiliaires de l’administration. Il ne devrait pas y avoir des empoignades qui mettent à rudes épreuve la paix et la tranquillité. Ainsi, le Gulmu retrouvera son rayonnement d’antan et le NUNBADO le respect et la considération au niveau national.

En conclusion, nous retenons que les problèmes actuels de la chefferie dans le Gulmu résultent de la non maîtrise, la méconnaissance de l’histoire et de la surestimation des pouvoirs du NUNBADO voulue en son temps par les colonisateurs pour assouvir leur objectif. Les causes lointaines sont les luttes fratricides de 1892 pour l’accession au trône de NUNGU tandis que les causes immédiates sont attribuées à la volonté du NUNBADO d’imposer des chefs de Diema en faisant fi des collèges de notables locaux compétents à la désignation des candidats retenus et lui soumettre pour la validation.

Du reste, toutes les archives, les rapports des administrations coloniales et les traditions orales sont unanimes sur l’organisation et le fonctionnement de la société en place à la veille de la conquête coloniale. Lesdits documents doivent servir de guide pour élaborer une charte de gouvernance traditionnelle au Gulmu. Il faut surtout respecter l’ordre organisationnel du royaume en place à l’arrivée du colonisateur et les chefs des Diema et le NUNBADO vont retrouver leur respect et la dignité dans l’exercice de leurs fonctions.

Il est reconnu que chaque génération a une mission à accomplir et la génération actuelle a le devoir historique de replacer le pays gulmance sur orbite en affrontant notre destin commun. C’est de cette manière que nous allons largement contribuer au retour à la paix sociale et contribuer au développement économique et social de notre cher le Burkina Faso.

Dr Salifou IDANI
Chevalier de l’Ordre national
Officier de l’Ordre des Palmes académiques
Médaille d’honneur des Collectivités locales

Sources :
Cartry, M. 1966 , Clans, lignages et groupes familiaux chez les Gourmantché de la région de Diapaga, in l’homme, V.6, cahier n° 3, Mouton et Cie, Paris, pp. 52-81.
Cartry, M. 1966, Attitudes familiale chez les Gourmantché, in l’homme, V.6, cahier n°3,
Mouton et Cie, Paris, pp.41-67.
Chantoux, A. 1966, Histoire du pays gourma par la tradition orale, éditions Tidogu, Fada
N’gourma (Haute-Volta), 61 p.
El Hadji BOLY Berry, 20 janvier 2023 lettre au Haut-Commissaire du Gourma ;
Kambou-Ferrand, (J.M.), 1993, Peuple voltaïques et conquête coloniale 1885-1914, Burkina-Faso, Paris, ACCT/ l’Harmattan, 480 p.

Madiéga, Y.G. Rapport entre l’administration coloniale française et les autorités traditionnelles du cercle de Fada N’gourma, Université de Paris VII, 88 p.
Madiéga, Y.G.1982, Contribution à l’histoire précoloniale du Gulma (Haute-Volta), Franz
steiner Verlag-Wiesbaden, 260 p.

Somda, N.C. 1985, Histoire du peuplement du Gulma par la tradition orale : synoptique des éléments d’enquête, I.R.S.S.H., Ouagadougou, 162 p.
Vermeersch (capitaine), 1897, rapport de conquête du Gourma, Madjoari

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